Avec un chiffre d’affaires de 130 milliards d’euros prévu pour 2021, l’e-commerce, en hausse de 15 % sur un an, enflamme l’activité des transporteurs. Selon Ontruck, les demandes de chargement progressent de 37 % en novembre et décembre. Les entrepôts mécanisés se développent et l’intelligence artificielle pointe son nez.
Fin 2021, la période de pics de livraison de décembre semble se maintenir à des niveaux élevés. Selon la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad), les ventes Internet enregistrent au troisième trimestre 2021 une hausse de 15 %, propulsant le volume d’affaires du commerce en ligne au-delà des 130 milliards d’euros d’ici à la fin de l’année ! Outre la remontée de 20 % des services, la vente de produits progresse, pour sa part, de 10 % par rapport au troisième trimestre 2020. Quant au montant moyen d’une transaction, à savoir 59,50 euros, il se maintient d’une année sur l’autre. Si les ventes d’habillement ont quelque peu ralenti depuis la réouverture des magasins (-6 %), comme celles du secteur beauté-santé (-10 %), les produits techniques maintiennent leur niveau (+1 %) à l’instar du mobilier et de la décoration (+2 %). Comme on pouvait s’y attendre, les ventes sur internet auprès des grandes enseignes continuent de progresser (+3 %) mais plus lentement depuis la réouverture des magasins après une augmentation fulgurante de 32 % en 2020. Enfin, les ventes de produits sur mobile, très soutenues depuis le premier confinement, poursuivent une croissance rapide de 13 %.
Augmentation moyenne de 37 % des demandes de chargements
Rappelons que les spécialistes de la livraison à domicile ou en points relais avaient enregistré l’année dernière une hausse de leurs flux de l’ordre de 20 % à 40 % avec un décollage manifesté dès octobre à la faveur du second confinement. « Cette année, nous prévoyons une augmentation moyenne de 37 % des demandes de chargements pour les mois de novembre et décembre par rapport au mois d’octobre 2021, explique Ronan Perrodou, directeur commercial d’Ontruck, un commissionnaire de transport électronique créé en Espagne en 2016 qui, en France, tire ses prévisions de tendance en analysant les données massives de plus de 400 prestataires de transport sous-traitants opérant principalement en Île-de-France. Il y a eu une première vague d’augmentation des demandes de chargements de 30 % liées au Black Friday, à partir du 16 novembre avec un pic le 25 novembre. La seconde vague, prévue pour les 9, 15, 16 et 17 décembre, concerne les achats de Noël.»
STEF Transport, bientôt dans l’IA
« La période des pics de livraison de fin d’année s’annonce très soutenue », reconnaît Damien Chapotot, directeur général délégué de STEF Transport. Outre les produits alimentaires transportés toute l’année, la préparation du grand coup de feu démarre juste après Pâques pour les chocolats. « La logistique et les opérations de copacking s’effectuent dès juillet avant la livraison des plateformes de la grande distribution. De même, les produits surgelés sont stockés dès l’été, reprend Damien Chapotot. Enfin sur la dernière quinzaine de décembre, l’accent est mis sur les produits festifs à durée de consommation plus courte : oies, chapons, canards gras, foies gras, fruits de mer, fromages, fruits exotiques, etc. » Le leader européen des services de transport et de logistique sous température contrôlée (-25°C à +15°C) doit alors adapter ses plans de transport et augmenter ses effectifs, tant en interne que chez ses sous-traitants habituels, pour répondre aux pics d’activité de décembre. Cette année, STEF Transport constate également une forte augmentation (environ 25 %) du nombre des promotions. À terme, cette adaptation pourrait se fluidifier grâce à l’application de la start-up DCbrain, spécialisée en intelligence artificielle appliquée aux réseaux physiques complexes. « À la clé, nous aurons une exploitation de notre réseau de transport plus vertueuse, une efficacité énergétique améliorée et une capacité d’anticipation accrue pour faire face aux pics d’activité », ajoute Damien Chapotot.
DHL à fond sur la livraison verte
« Nous nous attendons à livrer 5 millions de colis en décembre, soit 10 % de plus qu’en 2020 qui avait connu une progression de 20 %. Notre pic sera le 20 décembre avec 300 000 colis, explique Geoffrey Junior Dimelo, directeur de l’excellence opérationnelle de DHL Express, qui prévoit 38 vols quotidiens en France, soit quatre vols supplémentaires ainsi qu’une ouverture des services durant les quatre samedis avant Noël. La préparation a débuté durant les ponts du mois de mai durant le week-end du 14 juillet afin de travailler sur nos infrastructures. » Après une année 2020 « exceptionnelle », l’expressiste, qui dispose de dix-neuf Renault Master électriques et neuf eCrafter cette année, prévoit de doubler à trois millions de colis la livraison verte du dernier kilomètre en 2021 pour atteindre 70 % de livraisons en solutions vertes en 2025. Quitte à s’appuyer sur des partenaires comme TousFacteurs, Urbit, Yyper qui, à eux trois, livrent en soirée à vélo ou à pied 3 000 colis par jour.
Dernier en date, le partenariat avec la start-up Pickme donne à DHL Express France l’accès à 55 000 « voisins relais », en complément des 6 200 points de livraison de Relais Colis et des 80 consignes automatiques. « Avec le développement du télétravail, ces voisins sont davantage chez eux pour recevoir nos colis que les clients viendront chercher, décrit Geoffrey Junior Dimelo. Nous avons démarré dans le Val-de-Marne avec une centaine de voisins relais. Au bout de dix jours, nous en étions à 30 colis livrés et donc 30 récupérations par jour. Un vrai succès ! » Pour cette innovation française, le groupe a développé une interface de programmation liée à l’outil On Demand Delivery qui permet au client de choisir son mode de livraison. À cette organisation, DHL ajoute son nouveau Hub hyper automatisé de 32 000 m² à Roissy (170 millions d’euros d’investissement) qui est capable de trier 38 000 pièces à l’heure. Côté optimisation de la gestion de tournées, « nous testons aux Pays-Bas une solution à base d’IA avant, éventuellement, de la généraliser. Tous nos processus sont uniformisés mais chaque pays peut innover », poursuit Geoffrey Junior Dimelo.
Fedex Roissy : 68 000 colis et documents à l’heure
Les autres géants de l’express (Chronopost, Fedex et UPS) sont aussi sur le pied de guerre. À l’instar de Fedex Express qui prépare le pic de fin d’année un an à l’avance afin d’anticiper la demande sur les flux. « Cela nous permet d’ajuster et de planifier les capacités et les besoins opérationnels », explique Julien Ducoup, directeur général des opérations pour le Hub de Roissy où travaillent environ un tiers des 9 000 collaborateurs de Fedex Express. Les effectifs sont appelés à grossir puisque l’expressiste recrute actuellement 400 personnes en CDI dont 300 agents de piste et 100 agents de tris. Des recrutements en ligne avec les nouveaux investissements réalisés par Fedex sur son site de Roissy-Charles-de-Gaulle où l’expressiste a investi 220 millions d’euros.
En témoigne ce nouveau bâtiment de 4 800 m² consacré au fret lourd, qui est équipé d’un quai pour décharger les camions en vrac et les conteneurs. La zone consacrée aux produits dangereux a été agrandie et un autre bâtiment est sorti de terre. Ce dernier est pourvu d’un système de tri entièrement automatisé afin d’augmenter de plus de 40 % la capacité de tri du Hub. Lequel traite actuellement jusqu’à 38 000 colis et 22 000 documents à l’heure. D’ici la fin du premier trimestre 2022, Fedex espère atteindre la vitesse de tri de 68 000 colis et documents à l’heure. De quoi faire face à la hausse des volumes due au fait que beaucoup de PME s’orientent désormais vers l’e-commerce. « Pour répondre à ce phénomène, nous avons ouvert de nouvelles lignes et affrété de plus gros avions afin d’augmenter notre capacité de fret additionnel », indique le directeur général des opérations pour le Hub de Roissy. Lequel est alimenté quotidiennement par les véhicules de Fedex qui opèrent quelque 3 000 connexions routières par jour à partir de Lieusaint et Marly-la-Ville et réalisent 6 900 collectes et livraisons par jour. Ce qui représente trois millions de colis par semaine.
© Eliane Kan et Erick Haehnsen / Article publié dans l’Officiel des Transporteurs