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Les acteurs du transport exceptionnel obligés de s’adapter à de nouvelles conditions

Capelle développe des services connexes au transport exceptionnel. © Capelle
Article publié dans L’Officiel des Transporteurs - Le 31 octobre 2024

Dans un contexte où les difficultés économiques s’accentuent, les acteurs du transport exceptionnel se heurtent également à des problèmes techniques et administratifs.

Toujours aussi spectaculaire, le passage de segments de tunneliers ou celui de pièces de tokamak (réacteur de fusion nucléaire) sur les routes constituent des références emblématiques pour les spécialistes du transport exceptionnel. Un marché que dominent Transports Capelle (300 millions d’euros CA pour 2023 et 1 900 collaborateurs) et Transports Courcelle (61 millions d’euros de CA en 2021 et 700 collaborateurs). Entre 2022 et 2023, tous deux se sont illustrés par des acquisitions. Les Transports Capelle ont racheté Dom’Azur et STDR TEDL (+20 millions de CA) tandis que les Transports Courcelle ont absorbé Transfert Services (10 millions de CA, 50 salariés). En matière d’acquisition, citons le Groupe Charles André qui a pris une participation majoritaire dans Autaa (64 millions d’euros de CA en 2022 et 350 salariés) société spécialisée dans le levage et le transport. En 2024, ce mouvement d’acquisitions semble avoir marqué le pas. Les sociétés souhaitant renforcer leurs positions ou se développer sur de nouveaux marchés. 

En effet, la baisse de certaines activités, comme celles du BTP, amène les acteurs du transport exceptionnel à aller chercher de nouveaux flux. À l’instar de Capelle qui renforce ses positions dans les différents ports européens en allant prendre des affaires au départ ou en retour d’Anvers ou de Zeebruges pour acheminer des machines industrielles, équipements de TP ou des composants encore plus lourds. En outre, l’entreprise compte aussi sur le développement d’activités connexes en proposant ses compétences notamment en préparation et en accompagnement de convois. 

« Nous disposons de 120 voitures pilotes ainsi que d’un service spécifique d’autorisations de convoi », explique Michaël Capelle, directeur commercial du groupe éponyme qui vise les industriels, les entreprises de TP et les transporteurs qui font du transport exceptionnel de manière ponctuelle. Pour ce transporteur, qui compte 1 200 tracteurs et 2 500 semi remorques, 2024 a été marquée, entre autres, par le transport multimodal des éléments lourds destinés aux tunneliers de Toulouse. Pesant chacun jusqu’à 110 tonnes, ils ont été acheminés entre Paris et Toulouse en passant par le canal du Rhône et celui du Midi. Autre transport emblématique, celui de pièces du Tokamak destinées à l’ITER depuis Fos-Sur-Mer jusqu’à Cadarache. « Le poids total roulant du convoi devrait avoisiner les 950 tonnes, explique  Michaël Capelle qui se dit confiant pour 2025. Si les taux d’emprunt baissent et que les politiques pour les entreprises ne viennent pas entacher la dynamique industrielle, cela va générer de l’investissement et du transport exceptionnel par effet de bord. »

Cette cuve est appelée à être transportée par barge fluvial, depuis le Port de Salaise-sur-Sanne, en Isère. © DVI Production pour Capelle

Tracasseries administratives

Un optimisme qui n’est pas complètement partagé. « Si l’activité 2023 et 2024 était plutôt positive, nous nourrissons une certaine inquiétude pour les prochains mois [concernant le dynamisme du marché] », rapporte Olivier Arrigault secrétaire général à la Fédération nationale des transporteurs routiers (FNTR). Ces incertitudes économiques s’ajoutent aux difficultés techniques que posent encore le service de téléprocédure Mon transport Exceptionnel, le successeur de Tenet. Le nouveau site de demandes d’autorisation individuelle et de déclarations préalables souffre d’un manque criant d’ergonomie. En dépit des efforts consacrés par l’administration pour combler les défaillances techniques, saisir de nouveaux itinéraires prend toujours deux à trois fois plus de temps qu’avec Tenet. Autres difficultés, de plus en plus de communes, les conseils départementaux et les gestionnaires d’autoroutes réclament des avis de passage en amont. « Cela rajoute des délais administratifs supplémentaires et contribuent à renchérir le coût au kilomètre sachant que les études d’impact coûtent de quelques milliers d’euros à plusieurs dizaines de milliers d’euros », indique le représentant de la FNTR qui réclame une concertation sur la dégradation des infrastructures et une refonte des conditions de circulation du transport exceptionnel, sachant qu’elles ne satisfont aucune des parties prenantes.

Le transport exceptionnel doit s’adapter aux exigences grandissantes des gestionnaires d’infrastructures. © Couturier

Un métier de plus en plus sélectif

 « Outre le prix des matériels de levage qui a augmenté de 25 % à 40 %, nous faisons face à une complexité administrative grandissante, témoigne de son côté Damien Zucconi, président de l’entreprise Couturier (75 salariés dont une trentaine de conducteurs) qui a reçu cette année la certification Mase (management de la santé, de la sécurité et de l’environnement). Les administrations se montrent de plus en plus prudentes. Nous avons l’impression qu’elles augmentent les marges de sécurité, ce qui rend le métier de plus en plus sélectif. » En réponse aux difficultés posées par les administrations, l’entreprise propose des solutions toujours plus conservatoires pour les ouvrages d’art. Comme le recours grandissant aux sur-ponts. « Nous avons livré dans le sud-ouest deux transformateurs pour EDF de 230 tonnes chacun. Cela nous a amenés à poser deux surponts d’une vingtaine de mètres de long  pour le franchissement d’ouvrages d’art », précise Damien Zucconi. Une opération qui a coûté plusieurs dizaines de milliers d’euros. Sans compter les heures nécessaires à la mise en place des surponts. Autre tendance forte, le recours au multimodal, notamment pour l’export. « Nous y recourons sept ou huit fois par an », explique le dirigeant de Couturier. Le fluvial constitue un complément de plus en plus fréquent aux activités terrestres pour les colis lourds afin de venir au plus près des destinations finales. » Un mode de transport qui devrait encore progresser avec l’ouverture de nouveaux canaux.

© Eliane Kan / Agence TCA

Le transport exceptionnel européen appelle à une harmonisation des règles

Article publié dans L’Officiel des Transporteurs - Le 31 octobre 2024

L’Esta appelle à plus de sécurité et d’efficacité  pour le transport exceptionnel européen.

Dans son manifeste 2024-2029, l’Association européenne pour le transport routier exceptionnel et la location de grues mobiles (Esta) appelle à une harmonisation des règles européennes. Ses priorités portent, entre autres, sur l’uniformisation des permis, de la signalisation et de la documentation. A cela s’ajoutent l’accès à des parkings sécurisés et adaptés ainsi que la création de corridors dédiés dans le réseau routier trans-européen pour des trajets plus sûrs et sans dommage aux infrastructures.

© Eliane Kan / Agence TCA