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Michelin, vent en poupe pour le transport maritime vélique

Image de synthèse montrant des ailes de Wisamo de 800 m², installées sur un vraquier. Wisamo ©
Article publié dans le journal Les Échos – Le 17 mai 2023

Entité du groupe Michelin, Wisamo développe des voiles innovantes pour que la marine marchande réduise sa consommation de carburant. Après avoir testé pendant deux ans une aile gonflable de 100 m² sur le voilier de Michel Desjoyeaux, Wisamo finalise son installation sur un navire marchand et envisage de commercialiser une une aile vélique de 800 m² d’ici 2025 ou 2026.

 

Visant la neutralité carbone en 2050, le groupe Michelin veut décarboner le transport de ses centaines de millions de pneumatiques produits dans le monde. Parmi ses différentes actions, le groupe clermontois a acquis le brevet de deux inventeurs suisses, Laurent de Kalbermatten, concepteur du parapente, et Edouard Kessi, créateur des voiles 3DI (North Sails), pour ouvrir en 2020 le projet d’incubation Wisamo, acronyme de Wind Sail Mobility. Objectif : équiper les navires marchands de systèmes à propulsion vélique (par le vent) afin de réduire leur consommation de carburant d’au moins 20 %. Dotée d’une trentaine de collaborateurs, dont une douzaine à Nantes, Wisamo s’appuie sur les compétences scientifiques et technologiques du groupe afin d’élaborer une voile, ou plutôt une aile gonflable qui se déploie et se rétracte automatiquement autour d’un mât télescopique. 

 

« L’aile se gonfle grâce à une petite soufflerie, peu consommatrice d’électricité, placée dans un berceau », explique Sandrine Porcheret, directrice marketing et communication de Wisamo. Il suffit de quatre minutes pour déployer la voile de 100 m² ou la rétracter lorsqu’un gros grain est annoncé ou pour passer un pont. Comme le mât est télescopique et motorisé, le fonctionnement de l’aile est entièrement automatisé. En effet, il ne requiert ni point d’ancrage ni cordage sur le pont pour hisser la voile. De quoi réduire considérablement les manœuvres de l’équipage. Par ailleurs, ses capteurs détectent le sens du vent afin de orienter l’aile dans la direction optimale. 

 

Depuis deux ans, le voilier Wind of Change du navigateur Michel Desjoyeaux (deux fois vainqueur du Vendée Globe) embarque l’aile de Wisamo d’une hauteur de 17 m et d’une surface de 100 m² afin d’en tester la technologie et l’endurance. Constituée de matériaux souples innovants issus de la R&D de Michelin, l’aile est conçue pour résister à l’atmosphère saline et aux UV de la pleine mer. De quoi simplifier sa maintenance et envisager de ne la changer, à l’instar des pneus pour automobile, qu’au bout de quatre ou cinq ans. « En parallèle, nous sommes en train d’installer une aile analogue renforcée sur le MN Pélican, un roulier (qui transporte des poids lourds et autres véhicules) armé par la Compagnie maritime nantaise, affrété par Brittany Ferries. D’ici cet été, le MN Pélican équipé de l’aile de Wisamo débutera ses rotations entre Bilbao en Espagne et Poole au Royaume-Uni », reprend Sandrine Porcheret.

 

Bientôt une aile prototype de 800 m² 

 

Pour passer à l’échelle, Wisamo s’attèle à la conception d’une aile automatisée de 800 m²pour la propulsion hybride (conventionnelle + vélique) prévue aussi bien pour des navires existants que pour des bâtiments neufs. Surtout, elle pourrait être montée en série sur un même bâtiment. Dans le cadre d’un bateau de conception optimisée pour cette aile, la consommation de carburant pourrait alors baisser de 50 %. « Les premières livraisons pourraient intervenir en 2025 ou 2026, poursuit Sandrine Porcheret. En attendant, ce prototype sera arrimé à terre sur le littoral atlantique avant de le tester sur un bateau en conditions réelles. »

 

© Erick Haehnsen / Agence TCA