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Pics de fin d’année : l’effet Covid-19 booste les livraisons

Publié dans L’Officiel des Transports. Les spécialistes de la livraison à domicile ou en points relais enregistrent une hausse de leurs flux de l’ordre de 20 % à 40 % selon les acteurs. Ce décollage a démarré dès octobre à la faveur du second confinement contrairement aux années précédentes. En plus des jouets et produits techniques, les vêtements et articles de décoration seront au pied du sapin grâce aux soldes du Black Friday.

Les livraisons e-commerce boostées par le confinement

Les spécialistes de la livraison à domicile et en points relais se frottent les mains. Grâce au confinement, les Français ont pris l’habitude d’acheter sur Internet. Ce qui se traduit par une envolée des livraisons.

En cette période de Covid-19, les volumes B2C tirés par l’e-commerce ont été les seuls à avoir résisté au plus fort de la crise. À titre d’exemple, la fermeture des commerces non essentiels a en effet mis un coup d’arrêt aux transports de produits alimentaires pour la restauration. Idem pour les chaussures et vêtements destinés aux magasins. Pour autant, les consommateurs n’ont pas cessé de faire leurs emplettes en se rabattant sur le Net. Une tendance qui paraît durable. De fait, la livraison des colis à domicile limite les risques de contamination. En outre, il est possible, du moins dans les grandes villes, de recevoir son colis le jour même ou sous 24 à 48 heures.

Pics d’activités durant les deux confinements

Cet engouement massif en faveur du e-commerce se traduit par une forte croissance des flux de livraison. Les chiffres se sont multipliés par trois, voire par quatre ces dernières semaines. En témoigne Jean-Sébastien Leridon, le directeur général de Relais-Colis, premier réseau de livraison à domicile et en points relais. Ce dernier s’attend à traiter pas moins de 4 millions de colis sur la totalité du mois de décembre. Contrairement aux années précédentes, la montée en charge s’est faite de manière progressive. En effet, les années précédentes, les achats s’étaient concentrés sur la période située entre le Black Friday et la fin de l’année. En 2020, les acheteurs ont démarré leurs achats dès octobre, presque au lendemain de l’annonce du second confinement. Ce qui a généré pour les acteurs du e-commerce un deuxième pic d’activité après une première montée en charge qui s’était produite quelques jours après la décision du président de la République, Emmanuel Macron, de confiner la population en mars dernier. « Avant même que démarrent les achats du Black Friday, nous avions enregistré une augmentation des flux de l’ordre de 10 % à 20 % », rapporte Jean-Sébastien Leridon. D’ailleurs, ce dernier a dû composer avec la fermeture des commerces essentiels qui représentent 20 % de l’activité des points relais. Certains ont pu toutefois rester ouverts pour l’activité Click and Collect tandis que les magasins essentiels ont pris davantage de colis afin d’absorber les flux.

Triplement des volumes attendus

À cet égard, il faut noter que le Black Friday, en vigueur en France depuis 2017, contribue à modifier la nature des produits commandés en décembre. Auparavant, les e-consommateurs achetaient surtout des jouets et des produits techniques sur le Net. Désormais, les soldes aidant, ils achètent aussi des textiles et des articles de décoration. Des achats qu’ils avaient l’habitude d’effectuer en janvier et qu’ils réalisent désormais un mois plus tôt. « Résultat, nous allons faire passer trois fois plus de volumes que d’habitude sur une période de deux à trois semaines. Ce qui demande énormément d’anticipation pour adapter les moyens mis en œuvre, souligne Jean-Sébastien Leridon. Habituellement, nous réalisons un premier scénario avec nos clients en juillet que nous confirmons en septembre afin de caler l’organisation. Mais avec le confinement, il a fallu revoir le scénario en gérant les incertitudes liées aux fermetures de magasins non essentiels. », indique le dirigeant.

Cette année, il prévoit de traiter au plus fort du pic 400 000 colis par jour contre 350 000 colis l’année précédente en effectuant jusqu’à 1 000 tournées par jour et en mobilisant 2 000 personnes, 300 poids-lourds et 1 500 véhicules légers contre 700 habituellement.

Trois ans de croissance gagnés en un an

Les Relais-Colis ne sont pas les seuls à profiter de cette forte envolée des ventes du e-commerce. C’est bien sûr aussi le cas à La Poste. « En décembre, nous nous attendons à livrer 4 millions de colis par jour contre 1 à 2 millions habituellement », rapporte de son côté Jacques Gregorcic, directeur national des opérations de Colissimo. Cette progression des volumes a démarré dès le premier confinement. Période à laquelle les particuliers ont modifié leur comportement d’achat. Dès mars, La Poste s’est retrouvée avec une hausse des flux de 30 % alors qu’en général, le taux de croissance s’élève à 5 % à 7 %. « Ce taux s’est maintenu même après le premier déconfinement », indique Jacques Gregorcic qui estime que le secteur du colis a gagné en un an l’équivalent de trois ans de croissance.

Un mouvement anticipé par La Poste qui a investi 450 millions d’euros depuis quatre ans dans l’automatisation du traitement des colis et la préparation des tournées. En témoigne la plateforme Colissimo de Douvrin dans les Hauts-de-France qui s’est ouverte l’an dernier afin de servir les clients situés dans cette région ainsi que ceux des pays d’Europe du nord. 30 millions d’euros y ont été investis. D’une surface de 30 000 m², elle est équipée de deux trieurs de nouvelle génération d’une capacité de 32 000 colis par heure. Une nouvelle plateforme pareillement équipée a ouvert ses portes à proximité de Roissy afin de desservir cette fois les clients situés en Île-de-France.

Acquisition de 632 caisses mobiles

Par ailleurs, pour faciliter le chargement et déchargement des colis, des ‘‘camionneurs’’ (tapis roulants flexibles et articulés) ont été installés sur les quais. Autre facteur de productivité, les colis sont désormais mis en vrac dans les camions. Ce qui permet de passer de 1 300 à 3 000 colis par remorque. À cet égard, plutôt que de les transporter dans des semi-remorques, La Poste a décidé de mettre en place de nouvelles solutions de transport à travers les caisses mobiles. Elle en a acquis 632 cette année. Ce qui permettra de gagner en productivité puisqu’un seul conducteur pourra emporter 4 000 colis contre 3 000 auparavant. Enfin, les liaisons journalières entre les entrepôts vont être doublées, passant de 600 à 1 000 par jour.

Pour sa part, Star Service, l’expert en livraison du dernier kilomètre, constate lui aussi une forte hausse des flux de livraison en cette période de Covid-19. « La croissance des livraisons pour l’e-commerce est de l’ordre de 20 % à 25 % partout sur le territoire », indique Marc Joly, directeur commercial du groupe. Créée en 2017, Star Service réalise 200 millions d’euros d’euros de chiffre d’affaires pour 2018 avec 4 000 collaborateurs, une flotte de 3 800 véhicules multi-températures et 250 véhicules propres. Les livraisons en centre ville sont effectuées par des véhicules électriques et GNV ainsi que des triporteurs. Star Service effectue un million de livraisons en prestation Green chaque année.

Des livraisons sécurisées chez le particulier

Pour répondre au boom des livraisons, le groupe s’appuie sur ses livreurs dont plus de 95 % sont recrutés en CDI et formés en interne dans son école de formation. Même pendant le confinement, l’entreprise a continué à former à distance, via internet, les conducteurs nouvellement embauchés pour répondre aux demandes des supermarchés et du e-commerce. « Nous n’avons jamais été en mode dégradé », fait valoir Marc Joly. Ce dernier estime d’ailleurs qu’à l’heure de la Covid-19, la livraison collaborative a montré ses limites. « L’ubérisation ne permet pas de garantir le respect de certains processus », souligne le directeur commercial de Star Service qui a pris, dès le mois de mars, les mesures sanitaires nécessaires pour sécuriser les livraisons. En plus d’être équipés de masques et de kits de désinfection, les livreurs utilisent le système de paiement sans contact lorsqu’ils se rendent chez les particuliers. De quoi respecter les gestes barrières face au client final.
Une chose est sûre : une bon nombre de transporteurs vont vouloir se positionner sur le créneau du e-commerce. En témoigne l’enquête de BP2R menée du 28 septembre au 30 octobre 2020, auprès de 191 transporteurs localisés en France et en Europe, 34% des répondants déclarent déjà que leur entreprise est en cours de transformation pour se conformer aux attentes du marché B2C ou que cette transformation est prévue pour 2021.

Vigeanne Transports triple les cadences

Grâce à un investissement de 1,5 million d’euros, le transporteur logisticien peut faire face à la forte augmentation de ses flux de fin d’année qui sont passés en deux ans de 3 000 colis à 10 000 colis par jour.

C’est la course dans les entrepôts du groupe Vingeanne Transports. En cette période de pic d’activité de fin d’année, le nombre de colis traités par jour atteint 10 000 contre 3.000 en 2018. Une jolie performance pour cette entreprise spécialisée dans la distribution, la commission de transport et la logistique pour l’industrie et l’e-commerce. Sur les 30 millions d’euros de chiffre d’affaires que réalise le groupe, le commerce électronique représente 6 millions d’euros. Démarrée en 2012, cette activité concerne le livre, le textile, les DVD, les vinyles, les bandes dessinées, les jouets et autres gadgets. 10 000 m² sur les 30 000 m² de surface d’entrepôt opérés par le groupe lui sont réservés. « Pour optimiser nos processus logistiques, nous avons investi l’an dernier 1,5 million d’euros », rapporte Jean-Claude Plâ, le dirigeant de l’entreprise basée dans la Haute-Marne. Parmi les investissements consentis, citons la mise en place d’ascenseurs et de convoyeurs intelligents. Lesquels acheminent les commandes préparées au premier et deuxième étages du bâtiment vers les lignes d’expédition situées au rez-de-chaussée du site.

Un laser pour adapter les dimensions du carton

Les opérations de colisage et d’étiquetage ont été automatisées au maximum. Idem pour le pliage du carton qui est effectué à l’aide d’une machine dotée d’un lecteur laser. Ce qui permet d’adapter les dimensions du carton en fonction de la taille du produit. « Cette fonctionnalité améliore la protection du produit », fait savoir le dirigeant du groupe qui dénombre dans son effectif 230 collaborateurs. Dont 90 conducteurs et près de 60 opérateurs en logistique principalement en CDI. « En complément, nous faisons appel à des collaborateurs en CDD qui ont été préalablement formés à nos processus », explique Jean-Claude Plâ. Actuellement, le personnel est organisé en trois équipes qui démarrent successivement à 7 h, 8 h et 10 h de sorte à couvrir la plage horaire la plus large et disposer du maximum de personnes au moment clé, c’est-à-dire de 10 h à 16 h pour une livraison sous 24 h. Ce qui est le cas pour les 2/3 des colis et sous 48h pour le tiers restant. « Le transport du dernier kilomètre est effectué par des expressistes comme La Poste, Fedex, Mondial Relay ou Colis Privé », précise Jean-Claude Plâ dont l’informatique est interfacée avec celle de ses prestataires et de ses clients. Ce qui permet d’assurer la fluidité de l’information sur toute la chaîne, sans intervention humaine.

« La typologie de nos clients a complètement changé »

Interview de Fatah Ziani, directeur des opérations de DHL Express France qui pré&vopit de traiter jusqu’à 4,5 millions de colis sur le mois de décembre.

Quels volumes prévoyez-vous de livrer d’ici cette fin d’année ?

Le coup de feu va démarrer le jour du Black Friday et ne s’arrêtera qu’à la fin de l’année. Nous monterons jusqu’à 300 000 colis par jour. Durant ce pic de fin d’année, nous traiterons en moyenne 4,5 millions de colis sur le mois de décembre, soit 20 % de colis en plus par rapport à l’an dernier à la même période.

Qu’est ce qui change cette année ?

Avec les deux confinements dus à la Covid-19, la typologie des clients a totalement changé. Nous livrons davantage de clients à domicile que de magasins. La livraison chez les particuliers enregistre 20 % à 25 % de croissance par rapport à l’an dernier. Dans la majorité des cas, il s’agit de commandes de produits High Tech et de vêtements. Nous distinguons deux typologies de clients. Ceux qui font du Click-and-Collect et de l’autre, ceux qui font du télétravail. Les premiers réclament d’être livrés dans la journée tandis que les professionnels travaillant à domicile préfèrent les livraisons en soirée sachant que nous livrons jusqu’à 22 heures grâce au recours à la livraison collaborative.

À quelles plate-formes de livraison collaborative faites-vous appel et comment veillez-vous à la qualité des livraisons ?

Nous travaillons majoritairement avec trois partenaires, en l’occurrence Tousfacteurs, Urb-it et Yper (ex YouToyou). Chacun d’entre eux s’engage à former les coursiers auxquels ils vont remettre nos colis. Cette formation se déroule dans leurs hubs respectifs et dure une semaine. Elle porte, entre autres, sur l’utilisation de nos Pad, la prise de photo et autres processus ainsi que sur les protocoles et gestes barrières à respecter. Par ailleurs, les livreurs ont pour consigne de ne remettre un colis qu’en l’échange d’un code Pin qui est envoyé au destinataire. Cela permet de suivre en temps réel la performance de la livraison du colis. Ce processus est en œuvre depuis près d’un an.

Comment répondez-vous aux exigences des municipalités qui veulent des livraisons plus vertes ?

En 2021, nous avons prévu d’étendre la livraison verte grâce à des véhicules électriques. Ce mode de livraison offre plusieurs avantages. Il requiert moins de rupture de charge, de kilomètres à parcourir et de temps d’approche. D’ores et déjà, notre agence « Distrigreen » du 18ème arrondissement à Paris fait uniquement de la livraison verte avec une vingtaine de véhicules de 6 à 8 m³. Ils desservent trois arrondissements (18ème, 19ème et 20ème). Les colis distribués sont acheminés depuis Roissy par un camion qui les dépose dans notre agence du 18ème qui est équipée de bornes de recharges rapides. Nous avons d’autres projets « Distrigreen » dans le sud de Paris, à Lyon et à Marseille.

Les gros achats enregistrent aussi une hausse des ventes

Transporteur spécialisé dans la livraison à domicile de produits lourds, Vir enregistre une progression de 35 % en moyenne sur 2020. Si tous les segments sont touchés, les appareils de fitness, mobilier Out Door et équipements domestiques se distinguent cette année.

Le confinement a été propice aux gros achats plaisirs. En témoigne Jeremy Cohen Boulakia, président de Vir, une entreprise spécialisée dans la livraison à domicile de meubles, gros électroménagers et autres produits lourds ou encombrants. Une activité qui enregistre une pointe d’activité de 40 % actuellement depuis le mois de mai ! Une belle progression si l’on compare ce résultat à celui de mars dernier où l’activité, touchée par le démarrage du confinement, s’est révélée très faible. Et ce, avant de connaître une reprise en avril puis une période extrêmement soutenue en mai. Depuis, le volume n’est pas redescendu et s’est même amplifié durant le second confinement. « Tous les segments sont concernés, avec une sur-performance du mobilier Outdoor, des appareils de Fitness ainsi que des équipements domestiques tels que des cabines de douche, ballons d’eau chaude, radiateurs, etc », rapporte le président de Vir. Ce dernier enregistre pour 2020 plus de 2,1 millions de commandes contre 1,5 million l’an dernier. Soit une progression de 35 % en moyenne sur l’année.

Hausse de 30 % du chiffre d’affaires 2020

Cette forte augmentation des commandes se traduira par une hausse de 30 % du chiffre d’affaires qui devrait passer de 78 millions d’euros en 2019 à plus de 101 millions d’euros pour 2020. Pour faire face à cette explosion de commandes, l’entreprise a agrandi des entrepôts existants. Par exemple, celui de Bordeaux (Gironde) a vu sa surface tripler passant de 2 500 m² à 7 000 m². En outre, de nouveaux entrepôts ont été ouverts, notamment à Strasbourg, Clermont-Ferrand et prochainement à Nantes. À cela s’ajoute une plate-forme à l’international. Une première pour Vir. « Nous avons ouvert cet entrepôt de 4 000 m² à Bruxelles afin de livrer les consommateurs belges et luxembourgeois », indique le dirigeant de l’entreprise.

Ces ouvertures et agrandissements d’entrepôts ont permis d’accueillir davantage de véhicules et de collaborateurs. Les effectifs sont passés de 640 personnes au 31 mars à 900 personnes en CDI dont 90 CDI créés en novembre. Ces nouveaux postes ont concerné toutes les fonctions de l’entreprise. Depuis le directeur d’agence jusqu’au conducteur-livreur. Côté véhicules, en plus du renouvellement naturel de sa flotte, le transporteur en a acquis une trentaine de plus, dont sept camions électriques 3,5 tonnes. « Ils sont destinés à desservir la région parisienne au départ de notre entrepôt de Gennevilliers », explique Jeremy Cohen Boulakia qui table pour 2021 sur une croissance de 20 % du chiffre d’affaires.

© Eliane Kan et Erick Haehnsen